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comment on jeûnait.

117. — Cette pratique du jeûne, je suis forcé de le dire, est singulièrement tombée en désuétude ; et, soit pour l’édification des mécréants, soit pour leur conversion, je me plais à raconter comment nous faisions vers le milieu du dix-huitième siècle.

En temps ordinaire, nous déjeunions avant neuf heures avec du pain, du fromage, des fruits, quelquefois du pâté et de la viande froide.

Entre midi et une heure, nous dînions avec le potage et le pot-au-feu officiels, plus ou moins bien accompagnés, suivant les fortunes et les occurrences.

Vers quatre heures on goûtait : ce repas était léger, et spécialement destiné aux enfants et à ceux qui se piquaient de suivre les usages des temps passés.

Mais il y avait des goûters soupatoires, qui commençaient à cinq heures et duraient indéfiniment ; ces repas étaient ordinairement fort gais, et les dames s’en accommodaient à merveille ; elles s’en donnaient même quelquefois entre elles, d’où les hommes étaient exclus. Je trouve dans mes Mémoires secrets qu’il y avait là force médisances et cancans.

Vers huit heures, on soupait avec entrée, rôti, entremets, salade et dessert : on faisait une partie, et l’on allait se coucher.

Il y a toujours eu à Paris des soupers d’un ordre plus relevé, et qui commençaient après le spectacle. Ils se composaient, suivant les circonstances, de jolies femmes, d’actrices à la mode, d’impures élégantes, de grands seigneurs, de financiers, de libertins et de beaux esprits.

Là on contait l’aventure du jour, on chantait la