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une véritable passion pour la danse, qu’elle aime à la folie.

Quand elle se place à une contredanse, elle paraît grandir de deux pouces, et on croirait qu’elle va s’envoler ; cependant sa danse est modérée et ses pas sans prétention ; elle se contente de circuler avec légèreté, en développant ses formes aimables et gracieuses ; mais à quelques échappées on devine ses pouvoirs, et on soupçonne que si elle usait de tous ses moyens, madame Montessu aurait une rivale.

Même quand l’oiseau marche, on voit qu’il a des ailes.

Auprès de cette fille charmante qu’il avait retirée de sa pension, jouissant d’une fortune sagement administrée et d’une considération justement méritée, M. de Borose vivait heureux et apercevait encore devant lui une longue carrière à parcourir ; mais toute espérance est trompeuse, et on ne peut pas répondre de l’avenir.

Vers le milieu du mois de mars dernier, M. de Borose fut invité à aller passer une journée à la campagne avec quelques amis.

On était à un de ces jours prématurément chauds, avant-coureurs du printemps, et on entendait aux bornes de l’horizon quelques-uns de ces grondements sourds qui font dire proverbialement que l’hiver se casse le cou, ce qui n’empêcha pas qu’on se mît en route pour la promenade. Cependant bientôt le ciel prit une face menaçante, les nuages s’amoncelèrent, et un orage épouvantable éclata avec tonnerre, pluie et grêle.

Chacun se sauva comme il put et où il put ; M. de Borose chercha un asile sous un peuplier dont les bran-