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phoses que l’art leur a fait subir. Cet enchanteur a réuni les deux mondes, confondu les règnes et rapproché les distances ; le parfum qui s’élève de ces préparations savantes embaume l’air et le remplit de gaz excitateurs.

Cependant de jeunes garçons, aussi beaux que bien vêtus, parcourent le cercle extérieur, et présentent incessamment des coupes remplies de vins délicieux qui ont tantôt l’éclat du rubis, tantôt la couleur plus modeste de la topaze.

De temps en temps, d’habiles musiciens, placés dans les galeries du dôme, font retentir le temple des accents mélodieux d’une harmonie aussi simple que savante.

Alors les têtes s’élèvent, l’attention est entraînée, et pendant ces courts intervalles, toutes les conversations sont suspendues ; mais elles recommencent bientôt avec plus de charme : il semble que ce nouveau présent des dieux ait donné à l’imagination plus de fraîcheur, et à tous les cœurs plus d’abandon.

Lorsque le plaisir de la table a rempli le temps qui lui est assigné, le collége des prêtres s’avance sur le bord de l’enceinte ; ils viennent prendre part au banquet, se mêler avec les convives, et boire avec eux le moka, que le législateur de l’Orient permet à ses disciples. La liqueur embaumée fume dans des vases rehaussés d’or ; et les belles acolytes du sanctuaire parcourent l’assemblée pour distribuer le sucre, qui en adoucit l’amertume. Elles sont charmantes, et cependant telle est l’influence de l’air qu’on respire dans le temple de Gastéréa, qu’aucun cœur de femme ne s’ouvre à la jalousie.

Enfin le doyen des prêtres entonne l’hymne de reconnaissance ; toutes les voix s’y joignent, les instru-