Page:Physiologie du gout, ou meditations de gastronomie transcendante; ouvrage théorique, historique, et à l'ordre du jour, dédié aux gastronomes Parisiens (IA b21525699).pdf/385

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autres en taillant une croûte de pain qu’on attache avec un ruban de fil et qui fait l’office d’obturateur.

Préparez une tranche de pain qui dépasse de deux pouces de chaque côté le faisan couché dans le sens de sa longueur ; prenez alors les foies, les entrailles de bécasses, et pilez-les avec deux grosses truffes, un anchois, un peu de lard râpé et un morceau convenable de bon beurre frais.

Vous étendez avec égalité cette pâte sur la rôtie, et vous la placez sous le faisan préparé comme dessus, de manière à être arrosée en entier de tout le jus qui en découle pendant qu’il rôtit.

Quand le faisan est cuit, servez-le couché avec grâce sur sa rôtie ; environnez-le d’oranges amères, et soyez tranquille sur l’événement.

Ce mets de haute saveur doit être arrosé, par préférence, de vin du crû de la haute Bourgogne ; j’ai dégagé cette vérité d’une suite d’observations qui m’ont coûté plus de travail qu’une table de logarithmes.

Un faisan ainsi préparé serait digne d’être servi à des anges, s’ils voyageaient encore sur la terre comme du temps de Loth.

Que dis-je ? l’expérience a été faite. Un faisan étoffé a été exécuté, sous mes yeux, par le digne chef Picard au château de la Grange, chez ma charmante amie madame de Ville-Plaine, apporté sur la table par le majordome Louis, marchant à pas processionnels. On l’a examiné avec autant de soin qu’un chapeau de madame Herbault ; on l’a savouré avec attention, et pendant ce docte travail, les yeux de ces dames brillaient comme des étoiles, leurs lèvres étaient vernissées de corail, et leur physionomie tournait à l’extase. (Voyez les Éprouvettes gastronomiques.)

J’ai fait plus : j’en ai présenté un pareil à un comité