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que, le professeur entendit de si justes plaintes, et dans le plaignant reconnut un ami. « Vous ne mourrez pas, mon cher, dit-il d’un ton affectueux au magistrat martyr ; non, vous ne mourrez pas d’un mal dont je puis vous offrir le remède. Veuillez accepter pour demain un dîner classique, en petit comité ; après dîner une partie de piquet que nous arrangerons de manière que tout le monde s’amuse ; et comme les autres, cette soirée se précipitera dans l’abîme du passé. »

L’invitation fut acceptée ; le mystère s’accomplit suivant les coutumes, rites et cérémonies voulus ; et depuis ce jour (23 juin 1825), le professeur se trouve heureux d’avoir conservé à la cour royale un de ses plus dignes soutiens.

XIX
effets et dangers des liqueurs fortes.

La soif factice dont nous avons fait mention (Méditation VIII), celle qui appelle les liqueurs fortes comme soulagement momentané, devient, avec le temps, si intense et si habituelle, que ceux qui s’y livrent ne peuvent pas passer la nuit sans boire, et sont obligés de quitter leur lit pour l’apaiser.

Cette soif devient alors une véritable maladie ; et quand l’individu en est là, on peut pronostiquer avec certitude qu’il ne lui reste pas deux ans à vivre.

J’ai voyagé en Hollande avec un riche commerçant de Dantzig, qui tenait, depuis cinquante ans, la première maison de détail en eaux-de-vie.

« Monsieur, me disait ce patriarche, on ne se doute pas en France de l’importance du commerce que