tion, si je me décide à quitter le nid solitaire que je me suis fait ici, au bord du Rhône. Il n’y a pas huit jours, je lisais à mon Odille la fable des Deux Pigeons, et je l’ai fait pleurer, tant il y avait de larmes dans ma voix. Je te battrais, tiens, de te voir si heureux de la guerre, buveur de sang que tu es !
» Enfin il le faut : je ne déserterai pas le drapeau de mes camarades ; je ne resterai pas les bras croisés quand l’ennemi vient sur nos frontières nous menacer d’une autre invasion. Maudit Mazade ! c’est moi qui trouve encore les motifs de patriotisme et d’honneur qui te donnent raison.
» Je pars donc ; passe chez M. Gibert, et prie-le de suspendre toute vente de mes rentes. Je suspends moi-même l’achat que j’allais faire ici d’une île tout entière, à défaut de la Bellugue, d’une île plantée de saules, et que je sacrifie à ton Empereur en lui disant, comme le poëte Boubin d’Arles à Louis XIV :
Laisse-moi dans mon île, il n’y croît que des saules ;
Et tu n’aimes que les lauriers. »