Page:Pichot - Monsieur de l'Etincelle, ou Arles et Paris, t. I, Gosselin, 1837.djvu/96

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sement complet de toutes les entraves de la société, que j’avais prise tout-à-coup en haine, comme si c’était elle qui eût tort, et non pas moi. La vie errante me sourit comme une vie de vaste liberté. Je me disais que je serais bientôt accoutumé à la fatigue, à la sobriété, aux nuits passées sous la voûte du ciel, à ces hasards, à ces périls mêmes qui nous coûtent si peu quand nous allons les chercher de notre propre mouvement pour varier la monotonie d’une existence blasée. Mais je m’aperçus bientôt qu’il y avait une différence cruelle entre ces privations volontaires, quand ce ne sont que des accidents passagers, et ces mêmes privations continuellement imposées par la misère…… une cruelle différence, en d’autres termes, entre les aventures du chasseur et le vagabondage du mendiant. La solitude se peupla alors pour moi de tristes apparitions. M’exagérant à plaisir mes disgrâces, je fuyais souvent la ville, comme si j’en étais proscrit, ou de peur d’y être montré au doigt par les enfants de mes anciens camarades. Mais dans ces funestes accès de mélancolie, la campa-