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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/378

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à propos pour nous en excuser envers les juges equitables. Voila qu’avons escrit au chap. De Asilo, ou Oestro, en noz livrres intitulez de Aquatilibus, ainsi que sensuit. Aristoteles octavo de historia animalium, Thunni, inquit, & Gladij agitantur Oestro, canis exortu : habent enim utrique per id tempus sub pinna ceu vermiculum quem Asilum vocant. Idem author videtur Oestrum seu Asilum diversum à Pediculo & Pulice constituere, quum eis etiam seorsum nomina propria, id est, Pediculum marinum, id est, Pulicem marinum imponat. Tels sont les propres mots qu’avons escrit, par lesquels faisions manifeste distinction des trois susdictes especes, ne confondants l’une avec l’autre, comme chacun le peut voir. Ne sommes-nous pas en plaine campagne de liberté, en ceste spacieuse machine de monde, pour nous employer selon nostre devoir ? L’ancre & papier ne sont-ils pas communs à qui les peut employer, pour mettre ses conceptions, & discours en avant ? Ouy : mais touts ne sommes de mesme : sçachants que les affections qui sont cause de ce fait, ont grande diversité. C’est ouvrage digne d’un esprit esclave, de se mettre à injurier, & calumnier à tort celuy qui meriteroit louange. C’estoit trop grande violence, de dire en nostre mespris : Turpiter hallucinatum : veu qu’il en apparoist autrement. Ce n’est pour revenche qu’avons noté cecy : car tousjours serons trouvez ceder en raison à ceux desquels pouvons estre enseignez, estants touts prests à changer d’opinion, lá ou quelque autre fera apparoistre le contraire de ce qu’avons escrit. Nostre travail sur l’enqueste des oyseaux, poissons, plantes, animaux, & choses venants d’iceux, sera suffisant pour maintenir nostre honneur contre ceux qui le vouldront mordre, ou abayer. C’est chose qui doit esmouvoir les hommes à rire & à se moquer de celuy, qui se plaint d’un autre pour n’en avoir esté loué. Mais si nous avons entrepris faire mention de touts ceux qui nous ont obligez par leurs biensfaicts, il nous fauldroit une iliade, & n’escrire que de cela.

De la Soulcie, qu’on nomme un Poul.
CHAP. VII.


LE POUL ha prins tel nom de sa corpulence : car le voyant si petit, lon diroit proprement, qu’il n’ha le corsage gueres plus gros qu’un Poul. Aussi est-ce le plus petit des oyseaux. Ceux du Maine le nomment un Poul, ou une Sourcicle : mais ceux qui parlent meilleur Françoys dient une Soulcie : car il ha les sourcilz de plumes noires eslevees sur chasque costé des temples au dessus des yeux, au milieu desquelles il y ha comme une creste de plusieurs plumes jaulnes sur le sommet de la teste. C’est l’oyseau le plus gay qu’on cognoisse, & pour sa corpulence ha moult bonnes jambes, & bons pieds, & duquel le chant n’est gueres haultain : aussi ne gazouïlle-il point. Lon trouve quelques modernes qui ont voulu dire qu’il y eust plusieurs especes de cest oyseau, & en amenants deux ou trois especes les ont touts nommé Tyranni : mais lon peut prouver par le dire d’Aristote, au troisiesme chapitre du huittiesme livre des animaux, qu’il en est autrement : car il entend que Tyrannus est moult petit oysillon, vivant de vermines : chose bien experimentee à touts oyseleurs. Ce petit Poul hante entour les hayes