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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/411

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homme en prend quelquesfois cinq ou six douzaines par jour : & celles qui sont grasses & tendres, sont tresbonnes à manger. On les voit voler sans remuër les aelles : & toutesfois estants à terre demeurent immobiles, ne pouvants s’en voler, ne fuir en courant. Nature en son endroict s’est monstree maistresse ouvriere : car comme nous estimons le Daulphin, que noz poissonniers nomment l’Oyde de mer, ou Marsouin, estre le plus viste des poissons, aussi pretendons que ceste espece d’Hirondelle est le plus soubdain des oyseaux : toutesfois maintenons le Daulphin nager aussi viste en l’eau de la mer, que ceste Hirondelle vole en l’aer. L’un nage sans secousse de ses pinnules, ou aelles de poisson : l’autre vole sans battre des siennes. La raison en ha esté dicte au premiër livre, ou est fait mention du voler & marcher des oyseaux. Il est un poisson en la mer, dont avons baillé le portraict en noz livres De aquatilibus, qui ha prins son nom de l’Hirondelle, comme aussi l’herbe de Chelidoine. Ceste grande est diversement nommee entre nostre vulgaire : les uns dient Moutardiers, les autres grands Martinets.

De la petite Hirondelle.
CHAP. XXXIIII.


L’HIRONDELLE ainsi simplement proferee en nostre langue, est entendue de celle que nous cognoissons estre de moyenne grandeur, qui est plus grande que le petit Martinet, & moindre que la grande Hirondelle. Elle est si bien cogneuë par tout qu’il ne nous la fault ja descrire d’avantage : car les autheurs anciens en ont asses amplement parlé. Nous ne cognoissons oyseau qui vole plus agilement que l’Hirondelle : d’autant qu’elle ha moult bonnes aelles, & se fiant à son bon voler, entre privément dedens les maisons, & fait hardiment son nid es cheminees, & aux planchez. Nous ne voyons qu’elle descende sur terre pour prendre sa viande : car elle mange en volant. Il est bien vray qu’elle avalle aussi des pierres, pour se curer l’estomach. Il ne fut onc, que les Hirondelles n’ayent eu des enseignes de rouge dessous la gorge : car mesmement ja long temps ha, qu’Ovide ha dit en ceste sorte : Tecta subit, neque adhuc de pectore caedis Excessere notae, signataque sanguine pluma est. La couleur des plumes de son dos est comme verd brun, tirant sur l’obscur : son ventre est blanc, l’estomach est noir : mais les plumes au dessous du bec sont de couleur phenicée : c’est à dire, rougeastre. Elle ha le bec & les pieds noirs : mais son bec est quelque peu large, court, & poinctu par le bout, ayant moult grande ouverture en la gorge : que nature ha fait pour son bien, d’autant qu’elle prend sa pasture en volant. Sa queuë, comme aussi les aelles, est noire, & fourchée en forme de croissant, ayant quelques petites taches de blanc. Ses jambes sont courtes, & les pieds faitz à la maniëre des oyseaux qui se perchent. Lon pense qu’elle face ses petits deux fois l’an. Qui nous semble estre vray semblable : car nous voyons qu’elle est absente autant de temps hors de nostre païs, comme presente. Et pource qu’elle retourne lors que l’esclaire est en fleur, les autheurs ont donné le nom d’Hirondelle à l’esclaire,