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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/11

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D'UNE FEMME DU MONDE.

cerment ironique chez celles qui n’ont jamais connu le monde, amer et désenchanté chez les autres, étrange et séduisant chez toutes.

Et puis, ne sont-elles pas faites pour troubler les sérénités les plus confiantes, les peintures de la vie dans les sermons ? Quelles images !… Tantôt, c’est un sentier tout embroussaillé de ronces et d’épines et tantôt un calvaire dont la pente aride est rougie par le sang de ceux qui l’ont péniblement gravi.

Je me rappelle les dernières paroles que m’a dites la supérieure en se séparant de moi :

— Ma fille, souvenez-vous toujours, dans les chagrins et les épreuves qui sont le lot commun, qui seront le vôtre peut-être, souvenez-vous, ma fille, des pieux conseils que vous avez reçus durant votre jeunesse. Levez les regards vers le ciel et priez : la prière est la plus forte et la plus douce des consolations que Dieu a ménagées aux hommes.

Me voici au seuil de cette vie, à ce point que je ne croyais devoir jamais atteindre, tant j’avais fait mienne l’existence que je menais au couvent, me voici dans l’attente de ces souffrances dont on nous parle toujours et d’une façon si positive qu’on les dirait fatales.