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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/13

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D'UNE FEMME DU MONDE.

Clovers, 3 juin.

Quand je me suis réveillée ce matin, j’ai ressenti une joie paisible. Le malaise que j’avais éprouvé hier soir avait tout à fait disparu. J’étais heureuse de me retrouver chez moi, dans ma chambre, dans mon lit.

Autour de moi tout semblait me sourire et me souhaiter la bienvenue, et les moindres objets m’apparaissaient comme de vieux amis qui sont contents de vous revoir et qu’on est content de retrouver.

Alors, m’abandonnant à cette impression d’ivresse qui m’envahissait toute, j’allais me renfoncer frileusement sous les chaudes couvertures, tirer jusqu’à mon menton le couvre-pieds de soie rose, quand je me suis aperçue que le soleil frappait à mes carreaux : j’aurais eu mauvaise grâce à ne lui pas répondre. Aussi, comme si la cloche du couvent avait tout à coup tinté à mes oreilles, d’un bond je me suis élancée hors du lit et j’ai couru à la fenêtre.

Du revers de la main, j’ai effacé la buée qui troublait les vitres et m’empêchait de voir. La rosée du matin avait recouvert les pelouses