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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/155

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D'UNE FEMME DU MONDE.

Il me prit la main que j’avais appuyée sur le devant du tonneau et voulut la porter à ses lèvres.

Je résistai.

Poursuivant son idée, il reprit :

— Les femmes ne répondent pas toujours aux compliments qu’on leur fait, mais elles les acceptent toujours !…

Cela me fit de la peine, beaucoup de peine, de l’entendre ainsi parler : pourquoi me comparer aux autres femmes ? De là à me traiter comme telle, il n’y avait qu’un pas.

Je retirai ma main de la sienne : il la reprit vivement et pour la seconde fois essaya de la porter à ses lèvres.

— Roger ! murmurai-je, je vous en prie !

Il fronça les sourcils :

— Raymonde ! Vous ne m’aimez plus comme avant !

À ces mots, il se fit dans mon esprit comme un trait de lumière, et les pensées obscures et confuses qui s’y agitaient depuis quelques jours, s’éclairèrent nettement.

— N’est-ce pas vous, lui dis-je, qui ne m’aimez plus comme avant ?

— Moi ? Que voulez-vous dire ?

— Vous m’aimez davantage, je le crains :