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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/200

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LE JOURNAL

— Avant d’être admis parmi les serviteurs de Dieu, continua-t-il, vous savez, Raymonde, que le futur religieux subit un noviciat : si sa passion résiste aux pénibles épreuves auxquelles on la soumet, elle est jugée digne de Celui qui en est l’objet. Les longs mois qui viennent de s’écouler, dans la tristesse et loin de vous, n’ont-ils pas été une sorte de noviciat pour mon amour : il en est sorti triomphant, parce qu’il est grand, immense, immortel : il est digne de vous !

Et plus bas :

— Mais vous… m’aimez-vous encore ?…

Au travers des larmes qui coulaient de mes yeux, maintenant si douces, je souris :

— N’êtes-vous pas chez moi ?… Ne vous ai-je pas dit de revenir ?

Il me prit la main, et d’une voix profonde, profonde comme était sa pensée :

— Raymonde, murmura-t-il, savez-vous bien ce qu’est un amour comme le mien, quelle en est la nature et quelle en est la force ?

— Depuis que je vous aime, oui.

— Je vous adore !

— Hélas !… Je vous le rends.

— Hélas ? Pourquoi : hélas ? Raymonde !…