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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/225

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D’UNE FEMME DU MONDE.

l’a conduit au spectacle, à une féerie, tout plein qu’il est encore de visions merveilleuses, trouve sa vie monotone, insupportable : il en sait une autre, idéale. Je ne puis mieux comparer qu’à cette impression celle que j’ai moi-même ressentie aujourd’hui, pendant cette journée qu’il m’a fallu passer loin de celui que j’aime, au milieu d’un monde que j’exécre.

Nous sommes allés déjeuner au Lido avec les Thuringe, qui sont à Venise depuis hier matin. J’ai trouvé tout détestable, la nourriture, la conversation, les gens même avec qui j’étais.

Ce n’est pas d’ailleurs la nouvelle que M. Grandidier m’a apprise cet après-midi qui est de nature à tromper ma tristesse : nous devions, avant de retourner à Paris, nous arrêter un peu à Vérone, Milan, etc. ; il nous faut rentrer directement. M. Grandidier a reçu une dépêche de son secrétaire : sa présence à la Chambre est indispensable ; tout se brouille, il y a tout un nuage d’interpellations dans l’air, le ministère va être renversé, peut-être même la République… si le député de Gombourg s’en mêle : aussi il se remue, s’agite, s’affole, va partir incessamment. Tout cela pour ne rien dire ou répéter ce que diront les autres.