Aller au contenu

Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/234

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
232
LE JOURNAL.

— Raymonde !

— Vous oubliez où vous êtes et à qui vous parlez !

Je me levai et me dirigeai vers la porte.

— Raymonde, fit-il d’une voix sourde où grondait la colère, je pourrais d’un mot, d’un seul mot, répondre à tout ce que vous venez de me dire et vous imposer silence.

À ces paroles, surprise, je m’arrêtai.

Il continua, avec un sourire ironique, qui m’exaspéra et me fit crisper les poings :

— Bien que vous m’ayez accusé, il n’y a pas deux minutes, de manquer de délicatesse envers vous, j’aurai pourtant, moi, pauvre fils d’un paysan, celle de me taire.

Je le regardais, partagée maintenant entre la crainte, la curiosité et l’horreur.

La curiosité l’emporta.

— Dites ! m’écriai-je, appuyée à la table, car je chancelais, dites, je vous en prie !.… Je veux savoir !.…

Tandis que je parlais, l’idée m’était venue qu’il allait m’accuser d’être la maîtresse du comte de Clarance : il n’était pas possible en effet qu’il ne se fût aperçu de rien et d’ailleurs des âmes charitables, dont le monde est rempli, devaient avoir pris soin de le renseigner