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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/256

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LE JOURNAL.

Paris, 3 juillet.

De quel poids je me suis soulagée.

Je lui ai tout dit.

Il m’a écoutée attentivement, sans m’interrompre. Quand j’eus fini de parler, contre mon attente, il ne fit aucun éclat.

D’abord il ne répondit rien. Il se mit à arpenter la pièce de long en large. Je le suivais des yeux, avide d’entendre sa première parole. Il s’assit, se releva, se rassit. Alors il prit sa tête dans ses deux mains et demeura ainsi immobile.

Je compris qu’il pleurait.

— Roger ! Roger ! Vous ne m’en voulez pas ?

Il leva la tête et sourit tristement :

— Vous en vouloir ? dit-il.

Il se tut, soupira, puis reprit :

— Je devais m’y attendre.

Devant une telle résignation, que je n’avais pas prévue, je me trouvai tout à la fois heureuse et comme mal à l’aise.

Quelques minutes s’écoulèrent dans un profond silence, longues comme des siècles, mortelles d’angoisses.