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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/257

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D'UNE FEMME DU MONDE.

J’entendais le tic-tac monotone d’un balancier de pendule ; mes yeux étaient rivés sur la garniture d’argent d’un encrier, éblouissante au soleil.

Je fis sur moi-même un violent effort, et m’étant débarrassée de l’étrange apathie qui pesait sur moi, je relevai vers lui mes regards et murmurai :

— Vous l’aimerez, n’est-ce pas ?

Mais à peine avais-je prononcé ces mots que je me cachai la figure dans mes mains, honteuse de ma témérité.

Comme il ne disait rien, j’espérai un instant qu’il ne m’avait pas entendue. Je n’osai plus le regarder.

Il poussa un soupir et répondit enfin :

— Je tâcherai, Raymonde !

Une vague de bien-être se répandit en moi.

Encouragée, je poursuivis :

— C’est un innocent, lui, vous comprenez !… Et puis, c’est mon enfant, avant d’être… le sien ! Je l’aime déjà, donc vous l’aimerez aussi ! Oh ! dites-moi oui ! Nous l’aimerons beaucoup, n’est-ce pas, Roger, comme si…

Il m’arrêta :

— Qu’alliez-vous dire, grand Dieu !