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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/319

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D’UNE FEMME DU MONDE

à vous oublier. Le souvenir de nos amours me poursuit partout.

« J’ai voulu revoir Venise, ce pays où je connus de si beaux jours, de si douces ivresses, où nous nous aimâmes. Vous en souvenez-vous, Raymonde ? Oh ! la belle nuit, en gondole, sur l’Adriatique ! Vous rappelez-vous ce que vous me disiez alors !… Vous rappelez-vous vos serments d’amour… et nos rêves ! Hélas ! que ne suis-je mort en cette nuit de bonheur !

« Toutes les promenades que nous avons faites ensemble, je les ai refaites, seul, triste, pieusement, comme des pèlerinages. C’est alors que, ne résistant plus à la tentation, je prends la plume et vous écris cette lettre. Pardonnez-moi cette liberté : il ne dépend que de vous que je n’aie pas à la regretter.

« Raymonde, ma Raymonde adorée, que j’aime aujourd’hui plus ardemment, avec plus de force que jamais, est-il vrai que tout soit bien fini entre nous ! Oh ! non, n’est-ce pas ? Vous avez dû réfléchir depuis, Raymonde ! On ne foule pas impunément aux pieds le bonheur quand il se propose ! Moi aussi, j’ai réfléchi : j’ai été brutal, cruel, inhumain, en