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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/49

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D'UNE FEMME DU MONDE.

« Comme notre intérêt personnel ne s’améliore la plupart du temps qu’au détriment de l’intérêt général, la jalousie et tout ce qui en découle : la méchanceté, la rancune, la colère, la vengeance, etc… entrent en scène tout naturellement.

« Mais toutes ces vilaines choses, le monde sait les recouvrir d’un manteau. Et alors, ce qui dans le recueillement et le silence, quand on y réfléchit, épouvante et fait horreur, prend des dehors séduisants et splendides sous la clarté des lustres, au fracas des orchestres.

« Cette dernière pensée me remémore le souvenir d’un personnage que j’ai connu et qui est mort maintenant. Il était rongé par une affreuse maladie, une espèce de lèpre. Son corps, disait-on, n’était plus qu’une plaie suppurante, une pourriture vivante. Et cependant, comme cet individu avait la figure saine et de bon aloi, comme il était toujours très soigneusement et très richement vêtu, les étrangers le prenaient pour l’homme le mieux portant qui se trouvât sur terre.

« N’est-ce pas là l’image du monde : une pourriture recouverte de brocarts. »

J’ai refermé le volume, n’en voulant pas