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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/74

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LE JOURNAL

Tout de suite mes parents virent l’altération de mes traits, l’émotion répandue sur mon visage.

Mon père le remarqua le premier :

— Comme tu parais fatiguée, ma petite Raymonde ! Aurais-tu mal dormi ?

Pour toute réponse je les embrassai et, affectant une mine espiègle, afin de chasser l’accablante tristesse qui flottait dans cette pièce, je leur demandai quelle affaire d’état ils pouvaient bien avoir à me communiquer à pareille heure.

Ils sourirent.

— Ma chère enfant, me dit mon père, c’est en effet une sorte d’affaire d’état. Assieds-toi là, en face de moi, et causons. Nous allons, si tu le veux bien, nous entretenir d’une question dont l’importance est pour toi capitale et ne t’échappera pas, car tu es une fille sérieuse.

Je compris. Je compris qu’en cet instant, sur ce bureau, mon avenir allait se jouer et comme je sentais mes jambes fléchir, je profitai de l’invitation que mon père m’avait faite et je pris un siège.

— Je vous écoute, père.

Malgré l’effort que je fis pour l’assurer, ma voix trembla.