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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/76

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LE JOURNAL

— Tu te fais sans aucun doute, sur notre fortune, de grandes illusions, ma chère petite, illusions que rendent vraisemblables, très raisonnables même, les apparences. La vérité est que nous sommes à la veille d’être très pauvres !…

Il répéta :

— Très pauvres !

J’écoutais attentivement, sans perdre un mot. Un voile se soulevait devant mes yeux. Hélas ! Je n’avais deviné que trop juste !

— Et cependant, nous devons au nom illustre que nous avons l’honneur de porter, de l’entourer d’un certain luxe que permet seul l’argent.

Ces paroles me firent trembler. Anxieuse, j’attendais la suite.

— J’abrège. Tu es, ma chère enfant, en âge d’être mariée. Plusieurs prétendants briguaient l’honneur de t’avoir pour femme : ils étaient, pour la plupart, porteurs de bien beaux noms qu’il m’eût été doux de voir s’allier à celui de Clovers. Hélas ! Les noms aujourd’hui ne sont pas synonymes de fortune ! Et comme d’autre part, je n’ai pas de dot à te donner, un tel mariage eût été déplorable : c’eût été la vie modeste, pour commen-