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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/78

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LE JOURNAL

un amer regret ; mais ç’avait été plus fort que moi.

Je me précipitai aux genoux de mon père, lui pris les mains et les baisai :

— Pardon ! Pardon, père ! Je vous ai manqué de respect… je suis une misérable ! Pardon !

La figure de mon père s’adoucit aussitôt.

— Relève-toi, ma fille, et embrasse-moi. Tu as été un peu vive, mais je te pardonne. C’est le sang des aïeux qui vient de se révolter en toi, contre les nécessités implacables du jour. Je ne t’en veux pas. Tu ignores le monde, les mœurs de notre siècle, les besoins de la vie. Il est tout naturel que tu parles ainsi. Cela prouve ta grandeur d’âme… et ta jeunesse. Plus tard, bientôt, tu comprendras et tu te rendras compte que, si un instant j’ai volontairement oublié les vieux et respectables préjugés de notre race, ce n’a été que pour mieux songer à ton avenir et pour faire ton bonheur.

— Je vous remercie, mon père, et je suis certaine que tout ce que vous ferez sera bien fait. Et cependant permettez-moi une question : le mariage est-il, comme vous semblez le dire, une simple association, dont l’avenir