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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/94

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LE JOURNAL

m’adressai. « La prière est la plus douce et la plus forte des consolations que Dieu a ménagées aux hommes. » Je demandai à Celui qui est toute justice et toute vérité de bien vouloir m’éclairer, me dicter ma conduite.

Tandis que je priais, l’apaisement se faisait en moi : au trouble succédait le calme, et dans ce calme bienfaisant, il me sembla qu’une voix, qui descendait du crucifix d’ivoire suspendu à la tête de mon lit, murmurait : « Résignation. »

Oui, je devais me résigner, obéir. Eh quoi ! Mon bonheur était compromis ? La belle affaire !… Devais-je songer un seul instant à ma tranquillité, avant d’avoir assuré celle des êtres qui m’ont donné la vie.

Mais tout à coup, M. Grandidier se dressa devant moi : je le vis qui me tendait les bras, qui voulait me prendre !… À la pensée qu’il me faudrait appartenir à cet homme, je me révoltai de nouveau. Tout ce qu’on voudrait, la mort, oui, la mort, mais pas ça !

Mes membres tremblaient ; ma poitrine haletait, oppressée ; ma chair était moite ; une soif ardente me brûlait la gorge. Je courus à un guéridon, me versai à boire et bus avidement quelques gorgées d’eau fraîche.