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Page:Pierre Corrard - Les Opalines, 1908.pdf/154

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L'HOMME QUI A DÉCOUVERT SON MOI

précède la résurrection du soleil, et celle qui suit sa mort sont mes préférées. Leur recueillement fait le vide autour de nous, et il me semble qu’alors, ailée d’indépendance, ma pensée soit d’une lucidité plus subtile. C’est en ces moments-là que je me surpris à nu. Mais jusqu’ici je n’avais entrevu le fond de moi-même qu’à la clarté brève d’un éclair soudain. Aujourd’hui je crois que j’ai atteint à mon intimité et que j’y demeure.

La plupart des âmes ne sont qu’une accumulation d’extériorités. Leur personnalité ressemble à arbrisseaux qu’étouffent des lianes et des lierres, et qui, noyés dessous, ne sont plus qu'un prétexte à ces végétations parasitaires.

Des hommes ont passé par la vie qui ne se sont point connus. Il leur a manqué ou le recueillement, ou l’énergie, ou la curiosité, ou l’occasion tout simplement. J’avais le recueillement, j’avais — latente — l’énergie nécessaire ; j’avais la curiosité : l’occasion me manquait. Elle fut la Douleur.

Donc, j’ai pénétré en moi et je me suis reconnu,