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postérité s’est obstinée à appeler du nom de Cardan la formule qui donne la résolution des équations du troisième degré. » Cardan, cependant, avait reconnu la priorité de Tartaglia, ainsi que de ses prédécesseurs Scipion Ferro et Antoine Fiore ; de Ferro, Tartaglia ne cita pas même le nom, lorsqu’à son tour il publia sa solution. Les géomètres du xvie siècle avaient l’amour-propre irritable lorsqu’on s’emparait de leurs propres découvertes, mais la conscience large lorsqu’ils empruntaient les découvertes d’autrui.

On imaginerait difficilement que Cardan, si avide de connaître la trouvaille de Tartaglia et si prompt, malgré ses serments, à en orner son livre d’Algèbre, n’eût pas éprouvé la curiosité de connaître les pensées de Léonard de Vinci sur la Mécanique et la Physique et, les ayant connues, qu’il eût résisté à la tentation d’en glaner quelques-unes pour nourrir ses propres méditations. Il n’y résista pas.

En 1551, Cardan publiait ses vingt et un livres sur la Subtilité[1] ; une seconde édition[2] latine de cet ouvrage, plus complète que la première, paraissait dès 1554 et, en 1556, était traduite en français par Richard le Blanc[3] ; les éditions françaises ou latines de cet ouvrage se succédaient, nombreuses, pendant la seconde moitié du xvie siècle[4]. A cet écrit, Cardan joignit plus tard son

  1. Hieronymi Cardani metlici Mediolanensis, De Subtilitate libri XXI. Ad illustrissimum Principem Ferrandum Gonzagam, Mediolanensis provinciae praefectum. Lugduni, apud Guglielmum Rouillium, sub Scuto Veneto, in-8o, 1551.
  2. Je ne connais cette édition que par la mention qui en est faite par Cardan dans l’Apologie insérée, en 1530, à la fin de l’édition de Bâle.
  3. Les livres de Hierome Cardanus, médecin milanois, intitulés de la subtilité et subtiles inventions, ensemble les causes occultes et raisons d’icelles, traduis de latin en françois par Richard le Blanc ; à Paris, chez Charles l’Angelier, tenant sa boutique au premier pillier de la grand’salle du Palais ; 1556, in-4o.
  4. En 1557, la première édition du De Subtilitate avait été vivement prise à partie dans : Julii Caesaris Scaligeri exotericarum exercitationum Liber XV ; De Subtilitate ad Cardanum, Lutetiae, apud Vascosanum, 1557, in-4o. — Aux critiques de Jules César Scaliger, Cardan riposta, en 1560, dans l’Apologie qui termine l’édition suivante : Hieronymi Cardani, Mediolanensis medici, De Subtilitate libri XXI, ab authore plus quam mille locis illustrati, nonnulli etiam cum additionibus. Addita insuper Apologia adversus calumniatorem, qua vis horum librorum aperitur. Basilcae, ex officina Petrina, Anno MDLX, Mense Martio, in-8o.—Outre les éditions que nous venons de citer, nous avons trouvé à Bordeaux, à la Bibliothèque Municipale et à la Bibliothèque Universitaire : 1° deux autres éditions latines du De Subtilitate de Cardan : Norimbergae, apud Petreium, 1560 (in-fol.) et Lugduni, apud Stephanum Michel, 1580 (in-8°) ; 2° trois autres éditions des Livres de la Subtilité traduits en français par Richard le Blanc : Paris, Lenoir, 1556 (in-4°) ; Paris, Lenoir, 1566 (in-8°) et Paris, Cavellat, 1578 (in-8°) ; 3° trois autres éditions des Exercitationes de Scaliger : Francofurti, apud Claudium Marnium et haeredes Joannis Aubrii, 1607 (in-8°) ; Francofurti, apud A. Wechelum, 1612 (in-8°) ; Lugduni, apud A. de Harsy, 1615 (in-8°). Cette seule énumération fait éclater aux yeux la vogue extraordinaire dont a joui l’ouvrage de Cardan.