Page:Pierre Luguet Une descente au monde sous-terrien 1909.djvu/112

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une descente au monde sous-terrien

« Un autre me dit :

« — Zu mupu ruturu culpu.

« Et je répétai :

« — Zu mupu ruturu culpu.

« Un troisième articula :

« — Zo mopo rotoro colpo.

« Et je répétai :

« — Zo mopo rotoro colpo.

« Alors les hommes écailleux devinrent graves ; la sollicitude qu’ils me témoignaient se teinta d’un respect profond ; certains d’entre eux s’éloignèrent comme s’ils ne s’étaient pas sentis dignes de m’approcher, et les autres ne me parlèrent plus qu’après avoir incliné la tête comme pour un salut.

« Et je soupçonnai que je devais cette déférence subite à la faculté que je possédais, et qu’ils ne possédaient pas, de prononcer toutes les voyelles. Je m’en assurai, en disant des phrases quelconques en français. À chacune d’elles, l’expression de l’admiration s’accusa. Quant au respect qu’on me montrait, il s’était rapidement transformé en vénération ; c’est à peine si les Sous-Terriens, car vous avez deviné que depuis quelques instants je vous parle d’eux, ne se prosternaient pas devant moi.

« Et voici, car je ne veux pas vous la faire attendre plus longtemps, l’explication de leur attitude, que je ne saisis, moi, qu’à la longue.

« Les Sous-Terriens viennent au monde avec la bouche conformée de telle façon qu’ils pourront, dans le cours de leur existence, prononcer toutes les articulations, toutes les consonnes et les combinaisons de consonnes, mais une seule