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une descente au monde sous-terrien

— Qu’est-ce que c’est que ce farceur-là ? s’écria le marin. Mon jaune, celui qui arme le Brochet, n’est pas de ta couleur ; il est carotte. En plus, il ne baragouine que l’américain. Faudrait cependant voir à ne pas nous faire prendre un mât pour une drisse.

— Je vous dis que je me suis entendu avec votre capitaine, et que nous partons ce soir. Je le cherche pour lui payer la moitié de la somme, comme c’est convenu. Quant à ma nationalité, ce n’est pas votre affaire. S’il me plaisait d’être Américain tout à l’heure, et s’il me plaît d’être autre chose à présent, vous n’avez rien à y voir. Voulez-vous me dire où il est oui ou non ?

En parlant, Van Ah Fung avait tiré de sa poche un portefeuille respectablement bourré. Cette vue fit réfléchir l’ivrogne, qui répondit :

— Tout de même, ça pourrait bien être vous. Il me semble que je reconnais votre surcot à damiers. Bon ! j’vas vous quérir le capitaine, qui doit être à la « Baleine Couronnée ». Et sans être trop curieux, patron, où est-ce que nous allons comme ça ?

— En Amérique, répondit Van Ah Fung, impatienté.

— En Amérique ! s’exclama l’autre. Eh bien ! si nous y arrivons, ce sera à la nage. Jamais le Brochet ne fera cette promenade-là. Il ne tient plus sur l’eau que par sa couche de peinture. Et sa machine est poussive qu’on l’entend tousser à trois milles. Enfin ! c’est pas mon affaire. Du moment que vous payez et que le vieux veut bien vous emmener !… J’vas le quérir. Dans trois minutes nous sommes là.

Il partit, et revint en effet peu de temps après. Il ramenait