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une descente au monde sous-terrien

retourner à la capitale, dans la crainte inavouée de ne les voir pas résister jusqu’au bout. Mais aucun d’eux n’avait accepté ; tous avaient voulu persévérer dans l’abnégation, dans le courage, et participer au dénouement de l’aventure pour laquelle ils s’étaient volontairement proposés.

Le sentiment, auquel ils obéissaient en agissant ainsi, était complexe : il y entrait pour une part leur haine séculaire contre les Kra-las, et leur désir de venger les offenses passées ; il y entrait aussi l’amour que tous ressentaient pour le Président de la République Centrale. Il y entrait surtout la séduction qu’avait exercée sur eux tous Lhelma, si jolie, si douce, si brave, si sérieuse, et qui leur témoignait une si adorable sympathie.

On n’avait pas quitté l’oasis depuis huit jours que certains faiblissaient, saisis d’ardents accès de fièvre. Francken les soignait avec dévouement et intelligence, il se prodiguait à leur service, oubliant sa lassitude personnelle, et s’ingéniait à atténuer leur malaise. Mais son art et sa science, mal secondés par les conditions dans lesquelles se trouvait l’expédition, ne triomphaient pas à chaque expérience, et de même que les bêtes de somme emmenées de l’île capitale avaient jalonné de leurs monstrueux cadavres la route lugubre, de même des tombes y avaient été laissées de loin en loin, marquant les étapes de l’épreuve, et l’accroissement de la détresse.

Wilhelmine supporta vaillamment les fatigues de la route. Son âme était forte, et son jeune corps robuste. Elle aida le docteur dans sa tâche incessante auprès des malades, et plus d’une, parmi ces victimes de la plus pure abnégation, mourut dans un sourire, parce qu’il avait sur le front la main blan-