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une descente au monde sous-terrien

au rivage, on cessa de rationner le précieux liquide et la provende des animaux, et la marche reprit, plus alerte, plus courageuse, plus rapide.

Quand nous sommes arrivés à la dernière détresse, et près de la désespérance, la moindre amélioration de notre sort, nous produit l’effet d’un miraculeux baume, nous donne l’heureux oubli des épreuves subies, et ouvre notre âme à la vision confiante de l’avenir.

Et cependant l’expédition lancée vers le Pôle Sud n’était pas au bout de ses peines. Elle le savait. Le rivage de la mer atteint, l’inconnu restait béant devant elle, avec tous ses pièges et tous ses dangers.

Quarante-huit ou cinquante heures plus tard, ainsi que l’avaient annoncé les Sous-Terriens guidés par leur flair subtil et par l’instinct de la conservation, l’horizon changeait de nuance sous les yeux des voyageurs ravis. De l’ocre crue qui fatiguait si douloureusement leur vue, il passait insensiblement au fur et à mesure de la marche, au bleu sombre, et bientôt son immobilité désespérante se ponctuait de mouvements, et de reflets légers, indiquant qu’on allait sortir de la région morte pour entrer à nouveau dans celle qui pouvait créer et conserver la vie.

— La mer ! s’écriaient à nouveau les humains supérieurs dans un ardent élan de soulagement et de gratitude.

Lhelma, devinant la brise marine, se redressait sur sa couche. Phocas de Haute-Lignée et Francken se jetaient dans les bras l’un de l’autre, et le petit docteur, qui était resté suffisamment sombre et muet depuis l’aventure de l’oasis, retrouvait tout à coup son bavardage et son rire.