Page:Pierre Luguet Une descente au monde sous-terrien 1909.djvu/41

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

35
une descente au monde sous-terrien

tandis que s’avançait à leur rencontre un tout petit homme, ventru comme une circonférence, chauve et blond, complètement rasé et portant des lunettes d’or.

— Ah ! mes chers amis, vous voilà !… Bonjour, fillette. (Il s’était haussé sur la pointe des pieds pour embrasser Wilhelmine). Comment vas-tu ? Bien ? Je m’en doutais ; tu as une mine de printemps. Et toi, Van Tratter, ce rapport ? Grand succès, n’est-c epas ? J’en étais sûr. Tu es un linguiste incomparable, mon ami. Pour moi, j’ai découvert aujourd’hui un très curieux sujet. Je ne croyais pas, je vous l’avoue, que la pauvreté humaine pût prendre des formes semblables. Figurez-vous… Mais dis donc, ma petite Lhelma, si tu me présentais à Monsieur, que je n’ai pas l’honneur de connaître.

La jeune fille, souriant, prononça :

— Monsieur Jean-Fabien-Maurice-Noël-Alain de Kerbiquet, marquis de Plougoren, capitaine au long cours. Monsieur le docteur Andreus Francken.

Et comme elle avait parlé français, le petit homme usa immédiatement de cette langue, qu’il maniait agréablement

— Très honoré, cher Monsieur. J’aime beaucoup vos compatriotes. Ils sont braves et loyaux. On les accuse aussi d’être légers, mais ce sont surtout les gens lourds qui les accusent. Et pour moi c’est un charme de plus…

Wilhelmine jugea prudent de lui couper la parole. Le petit docteur l’avait, en effet, intarissable. Elle coulait de ses lèvres comme jaillit l’eau d’une source bien alimentée. On ne le supportait que parce que c’était un véritable savant, disant toujours des choses intéressantes, et parce que c’était un cœur admirable, qui, sous couleur d’étudier le paupérisme, distri-