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une descente au monde sous-terrien

— Excusez-moi, monsieur, j’avais un ordre à donner. Continuez, je vous prie.

— J’ai donc l’honneur de vous demander, capitaine, poursuivit le petit Américain, l’autorisation de prendre passage à bord de votre yacht, en qualité de représentant du Midday-Star et à ses frais.

Depuis quelques instants, une ombre gigantesque croisait sur le pont, devant la passerelle. Il faisait sombre, et William Richardson ne l’avait pas remarquée. Jean Kerbiquet lui fit un signe mystérieux, et cette ombre, noire dans le noir de la nuit, vint, sans faire plus de bruit qu’un chat, se placer derrière l’Américain. Quand elle y fut :

— Les bras, Congo ! Tiens bon ! s’écria le jeune capitaine.

La recommandation de tenir bon était d’ailleurs superflue. Le géant avait serré autour des biceps de l’étranger ses pattes énormes, et il lui aurait aussi été impossible de bouger que si on l’eût amarré avec un kilomètre de câble.

Alors Kerbiquet s’avança, décoiffa le petit homme, lui ôta sa perruque et sa barbiche rouge, et, soulevant une lanterne, éclaira la face jaune de Van Ah Fung, à présent, comme, on dit, dans ses petits souliers.

Kerbiquet le considérait gravement.

— Monsieur, dit-il enfin, ce que vous venez de faire mérite un châtiment exemplaire, et je vous avoue que je me sens tout disposé à vous le donner. Je suis maître absolu ici ; j’ai droit de vie et de mort sur tous ceux qui se trouvent à mon bord, et surtout sur ceux qui s’y trouvent en contrebande. Je pourrais vous faire corriger à coups de garcette ; je pourrais vous faire mettre à fond de cale et vous y laisser pourrir