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HÉSIODE.

inhumé d’abord dans le canton de Naupacte. Mais on ne sait ni dans quel pays il mourut, ni à quel âge. Il est probable qu’il parvint à une haute vieillesse ; car l’expression vieillesse hésiodéenne était passée chez les Grecs en proverbe, pour désigner une longévité s’étendant au delà de l’ordinaire mesure.


Jugement sur la poésie d’Hésiode.


« Hésiode s’élève rarement. Une grande place est occupée chez lui par des énumérations de noms. Pourtant il y a dans ses préceptes d’utiles sentences. Ses expressions ont de la douceur, et son style n’est point à mépriser. On lui donne la palme dans le genre tempéré. » Tel est le jugement de Quintilien sur le poëte d’Ascra. Sans doute Hésiode n’est pas un génie de premier ordre. Ses modestes poëmes ne méritent nullement d’être rangés sur la même ligne que l’Iliade et l’Odyssée. Il n’a ni la fécondité d’Homère, ni sa puissance de création, ni cet art de coordonner un tout que nous avons admiré chez le poëte ionien. Hésiode n’a laissé que quelques centaines de vers ; il n’a peint ni un Achille, ni un Ulysse, ni même un Ajax ; ses poëmes sont composés avec une sorte de négligence, comme s’il avait beaucoup plus songé à entasser les vérités et les enseignements qu’à les faire valoir, et à enrichir le fond qu’à perfectionner la forme ; enfin sa diction a souvent je ne sais quoi d’un peu triste et revêche, qui rappelle pour ainsi dire les brumes d’Ascra, et sa versification n’a ni l’heureuse facilité ni l’harmonie variée de celle d’Homère. La lecture d’Hésiode exige une sorte d’effort : sa pensée ne se révèle pas toujours du premier coup, ni avec toute la clarté qu’exigerait notre esprit. Mais il y a dans ses ouvrages tel récit, comme celui de la guerre des Titans, comme la légende des âges du monde, qui ne pâlirait pas trop, comparé même aux plus brillantes créations de l’épopée homérique. Ses descriptions aussi sont faites de main de maître : la touche en est forte, quelquefois gracieuse ; le coloris en est inégal, mais la vigueur de l’expression y compense ce qui manque souvent du côté de la lumière et de l’éclat. Hésiode parle des phénomènes de la nature en homme