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HÉRODOTE. HIPPOCRATE

carnasse, une retraite à l’abri de tous les orages. Il choisit pour son exil volontaire la ville de Thuries, que les Athéniens avaient fondée en 444 dans la Grande-Grèce, sur l’emplacement de l’ancienne Sybaris. On ignore l’époque précise de son départ pour Thuries ; mais il ne fut pas un des fondateurs de la ville. Il vécut de longues années dans sa patrie nouvelle, et il y mourut dans un assez grand âge, vers l’an 406 avant notre ère. Il se donne à lui-même, en tête de son Histoire, le nom d’Halicarnassien, à raison du lieu de sa naissance ; mais plus d’une fois il est désigné comme Thurien par les auteurs. Thuries l’avait adopté pour sien, et on le connut longtemps en Grèce comme citoyen de Thuries.

Hérodote avait parcouru pendant sa jeunesse, comme je l’ai dit, les merveilleuses contrées de l’Orient et les villes grecques de l’Asie. Ses explorations dans la Grèce européenne commencèrent plus tard, mais sans qu’on sache à quel moment. Ce qui est certain, c’est qu’il avait visité presque tous les lieux de quelque renom, villes, temples, champs de bataille, et dans les îles et sur le continent, depuis la Thrace jusqu’en Italie.

La réputation littéraire d’Hérodote remplissait déjà la Grèce, avant même qu’il passât d’Halicarnasse à Thuries. En 446, à l’âge de trente-huit ans, il était venu à Athènes pour la fête des grandes Panathénées, et il y avait lu en public des fragments de son ouvrage, fort incomplet encore, mais dont certaines parties étaient à peu près au point où il les voulait mettre et où il les a laissées. L’assistance avait été émerveillée de ces récits, et les Athéniens avaient voté au conteur incomparable une récompense de dix talents, plus de cinquante mille francs de notre monnaie. Longtemps avant cette époque, dès 456 selon une tradition plus douteuse, il avait déjà fait une lecture de ce genre à Olympie ; et c’est là que s’était allumée, dit-on, dans le cœur de Thucydide enfant, cette noble ambition de gloire si bien secondée depuis par le génie.

Quoi qu’il en soit, ce n’est ni en 456 ni même en 446 qu’Hérodote pouvait livrer à l’admiration des hommes autre