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CHAPITRE XXIX.

une belle renommée. Il avait plus de quatre-vingts ans quand les Athéniens, réconciliés avec les Spartiates, révoquèrent l’arrêt de bannissement porté contre lui. Mais il ne paraît pas que Xénophon soit jamais revenu se fixer dans sa patrie. Il s’était marié assez tard, et il avait alors deux fils dans la fleur de l’âge. Ces deux jeunes hommes combattirent dans les rangs de l’armée qui fut défaite à Mantinée, en 363, par Épaminondas. Gryllus, l’un des deux, y fut tué. On dit que le père célébrait un sacrifice quand on lui apporta la funeste nouvelle. Il ôta la couronne qu’il avait sur sa tête ; puis, ayant appris que Gryllus était mort en brave, il la remit sans verser une larme, disant : « Je savais bien que mon fils était mortel. » Mais, malgré cet effort de résignation, sa douleur fut profonde et dura tout le reste de sa vie. Pour se distraire et se consoler, il se remit, avec plus d’ardeur et de fécondité que jamais, à composer de nouveaux ouvrages, et il ne suspendit ses travaux qu’à son dernier jour. Il avait quatre-vingt-dix ans, dit-on, quand il écrivit le traité des Revenus de l’Attique, si toutefois ce petit livre est de lui. Il mourut peu de temps après, à Corinthe, en l’année 355 ou 354 avant notre ère.


Xénophon écrivain.


Les éloges que les anciens ont décernés à Xénophon se rapportent uniquement à son style. Cicéron, par exemple, dit que ce style est plus doux que le miel, ou bien encore que les Muses ont parlé par la bouche de Xénophon. Quintilien se borne à répéter à peu près la même chose, sinon qu’il applique à Xénophon le mot d’un poëte comique à propos de Périclès, que la Persuasion était assise sur ses lèvres. Il est certain que les écrits de Xénophon sont en général d’une agréable lecture. Ils le doivent sans doute à la simplicité, à la clarté de l’élocution, à cette grâce non maniérée dont parle Quintilien ; mais ils le doivent bien plus encore à l’intérêt ou à l’utilité des choses qu’explique ou que raconte l’auteur. Si Xénophon avait passé sa vie à composer des discours, il aurait pu avoir des admirateurs à Athènes, ou parmi les ama-