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L’INSTALLATION DU RÉGIME

nisme français, mais encore de rallier à l’État les industriels de Belgique.

L’instruction publique, que la Loi fondamentale abandonne à la direction exclusive du roi, est l’objet principal de la sollicitude du gouvernement. Les soins dont il l’entoure attestent l’importance qu’il lui reconnaît. Comme les princes éclairés du XVIIIe siècle, Guillaume y voit le moyen le plus efficace de gagner la nation à l’esprit moderne, de lui permettre d’apprécier les réformes bienfaisantes du souverain et de développer, au profit du bien général, ses énergies engourdies et paralysées par l’ignorance. Mais pour qu’elle y réussisse, il faut, qu’arrachée à l’Église, elle se développe et s’organise sous le contrôle et la protection de l’État.

En cela, Guillaume ne fait que continuer ou plutôt ne fait que reprendre l’œuvre tentée dès la fin du XVIIIe siècle par Marie-Thérèse et Joseph II, et que la République française puis l’Empire s’étaient efforcés de réaliser sans y réussir. C’est en vain que la Révolution avait revendiqué le monopole de l’instruction et prétendu former par elle le sentiment civique. Ses tentatives, contrariées par les troubles civils et par la guerre, se trouvèrent bientôt déformées et remaniées par l’Université impériale, pour laquelle le but suprême de l’enseignement avait été de façonner l’esprit de la bourgeoisie au service du gouvernement. Seul l’enseignement secondaire l’avait intéressée. Sa sollicitude s’était portée avant tout sur les lycées et les collèges. Lors de l’effondrement de l’Empire en 1814, les maigres facultés établies à Bruxelles disparurent. Quant aux écoles populaires, elles présentaient le spectacle le plus lamentable. La tâche s’imposait d’accomplir ce que l’État français n’avait pas réalisé en Belgique. Et heureusement, pour substituer son action à la sienne, le roi n’avait qu’à s’inspirer de l’exemple de la Hollande.

Par opposition à la Belgique où, depuis le XVIIe siècle, l’enseignement populaire ne comprenait guère que le catéchisme, en Hollande, comme dans tous les pays protestants, la religion, en imposant à tous la lecture de la Bible, avait fait de l’école l’indispensable auxiliaire du temple. Le