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AGITATION DES CATHOLIQUES

imagination », et rendait publique une lettre ministérielle accusant l’archevêque d’avoir oublié les « convenances » et le respect dû au souverain[1]. Des poursuites étaient intentées au curé de Hauthem-St-Liévin, qui avait attaqué en chaire le gouvernement, et à un prêtre de Lierre, auteur d’une ode latine contre les calvinistes[2]. Les applaudissements de la presse libérale et ministérielle augmentaient encore l’amertume des catholiques. Ils soupçonnaient le roi de professer personnellement l’animosité qu’elle témoignait à l’Église. Une audience qu’il avait accordée à Mgr. Vet, chef de l’Église dissidente d’Utrecht, était interprétée comme une manifestation en faveur du jansénisme. Enfin, les subsides accordés aux établissements d’enseignement mutuel dans le même moment où les frères de la doctrine chrétienne étaient expulsés du royaume, dévoilaient, disait-on, l’intention de bannir la religion de l’école.

Au milieu de l’exaspération des esprits, l’intransigeance confessionnelle se réveillait. En prétendant imposer la tolérance par voie administrative, le roi n’avait abouti qu’à ramener l’Église belge à un exclusivisme étroit et soupçonneux. L’adhésion bruyante des calvinistes aux arrêtés du 14 juin leur donnait comme un relent d’hérésie. Des paroles malheureuses avaient été prononcées. Aux États-Généraux un député du Nord, van Utenhove van Heemstede, avait reproché au clergé belge, au milieu des marques d’approbation de ses collègues protestants, d’être « plongé dans les ténèbres de l’ignorance et de se montrer animé du plus intolérant fanatisme »[3]. À ces attaques, l’Église répondait par un redoublement d’orthodoxie. Un prêtre français qui avait prêché à Bruxelles contre l’archevêque, se voyait frappé d’interdit. La vie de Jésus, récemment publiée par le professeur Schrant, était mise à l’index. Dans plusieurs communes des Flandres, les curés refusaient l’absolution aux membres de la société de

  1. Terlinden, op. cit., t. I, p. 404, 462.
  2. Bergman, Geschiedenis der stad Lier, p. 563.
  3. De Gerlache, op. cit., t I, p. 386.