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FLEURUS

Le 1er  octobre, le comité des contributions de Bruxelles expose que « le but du républicanisme est de niveler les fortunes pour faire disparaître autant que possible l’aristocratie des richesses ». Et par richesse, il fallait surtout entendre, disait-il, celle qui vient « du hasard », c’est-à-dire de la naissance ou du privilège, et non celle qui a sa source dans le talent et dans le travail[1].

Ainsi, tandis que l’impôt devait épargner cette classe d’hommes nouveaux et de capitalistes dont l’habileté avait su profiter de la Révolution pour faire fortune, il tomberait de tout son poids sur la noblesse et le clergé. L’anticléricalisme, d’ailleurs, reparaissait avec le jacobinisme. L’Église n’était-elle pas le plus ferme appui de l’Ancien Régime ? Dès le mois de septembre, la Société populaire de Bruxelles demandait que tous les prêtres fussent expulsés dans les vingt-quatre heures. À Mons « pour complaire aux patriotes républicains », le tribunal révolutionnaire faisait fusiller un Dominicain qui, pendant la restauration autrichienne, « avait fait imprimer l’apologie de Louis XVI martyr »[2].

Les malversations des uns, les violences des autres ne pouvaient continuer sans compromettre la République. Elles inquiétèrent tout de suite les représentants[3]. Dès le 22 août, ils dénonçaient au Comité de Salut public les scandales de l’agence du commerce. Ils s’effrayaient de voir que, sous prétexte de patriotisme, trop de gens ne recherchaient « que des emplois et de l’argent ». Ils commençaient à sévir contre les outrances et les illégalités des Sociétés populaires et le 13 septembre fermaient celle de Bruxelles à cause des « déclarations incendiaires » qui s’y faisaient. S’ils recommandaient de « saigner

  1. Rapport du Comité des contributions au Magistrat de Bruxelles (Bruxelles, 1794).
  2. Descamps, Mémoires de la ville de Mons, p. 220 et suiv. — Au mois de septembre, on avait organisé des tribunaux criminels extraordinaires à Bruxelles, Anvers, Mons, Liège, Aix-la-Chapelle, afin de remplacer les juridictions militaires en matière d’attentats contre la République. Voy. P. Verhaegen, Le tribunal révolutionnaire de Bruxelles. Annales de la Soc. Archéologique de Bruxelles, t. VII [1893], p. 412 et suiv.
  3. Aulard, Recueil, t. XVI, p. 276 et suiv., p. 665 et suiv., XVII, p. 91 et suiv., XVIII, p. 585 et suiv.