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présente encore contraste avec l’atonie qui, peu à peu, s’empare des provinces continentales. Elle continue à maintenir en contact l’un avec l’autre l’Orient et l’Occident. On ne voit point cesser l’intercourse des produits manufacturés ou des productions naturelles des climats si divers baignés par la mer : tissus de Constantinople, d’Édesse, d’Antioche, d’Alexandrie, vins, huiles et épices de Syrie, papyrus d’Égypte, blés d’Égypte, d’Afrique, d’Espagne, vins de Gaule et d’Italie. La réforme monétaire de Constantin basée sur le solidus d’or a même dû favoriser singulièrement le mouvement commercial en le dotant du bienfait d’un excellent numéraire, universellement usité comme instrument des échanges et expression des prix.

Des deux grandes régions de l’Empire, l’Orient et l’Occident, la première l’emportait infiniment sur la seconde, non seulement par la supériorité de sa civilisation, mais par le niveau beaucoup plus élevé de sa vitalité économique. À partir du ive siècle il n’y a plus de véritables grandes villes qu’en Orient, et c’est là aussi que se concentrent, en Syrie et en Asie Mineure, les industries d’exportation et en particulier celle des textiles, dont le monde romain constitue le marché et que transportent les bateaux syriens. La prédominance commerciale des Syriens est certainement l’un des faits les plus intéressants de l’histoire du Bas Empire[1]. Elle a dû contribuer largement à cette orientalisation progres-

  1. P. Scheffer-Boichorst, Zur Geschichte der Syrer im Abendlande (Mitteilungen des Instituts für Œsterreichische Geschichtsforschung, t. VI [1885], p. 521) ; L. Bréhier, Les colonies d’Orientaux en Occident au commencement du Moyen Âge (Byzantinische Zeitschrift, t. XII [1903]). Cf. F. Cumont, Les religions orientales dans le paganisme romain, p. 132 (Paris, 1907).