Page:Pirenne - Les Villes du Moyen Âge, 1927.djvu/134

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qui de lui se dirigent vers les portes donnant accès sur la campagne. Car le faubourg marchand, et il importe de relever ce trait avec une attention particulière, s’entoure bientôt d’ouvrages de défense[1].

Il était impossible qu’il en fût autrement dans une société où, malgré les efforts des princes et de l’Église, la violence et la rapine sévissaient de façon permanente. Avant la dissolution de l’Empire Carolingien et les invasions normandes, le pouvoir royal avait réussi tant bien que mal à garantir la sécurité publique, et il semble que les portus de ce temps-là, ou tout au moins le plus grand nombre d’entre eux, demeurèrent à l’état de lieux ouverts. Mais déjà au milieu du ixe siècle, il n’existe plus, pour la propriété mobilière, d’autre garantie que l’abri des murailles. Un texte de 845-846 indique clairement que les gens les plus riches et les rares marchands qui subsistent encore ont cherché un refuge dans les cités[2]. La renaissance commerciale surexcita trop bien les appétits des pillards de toutes sortes pour que l’impérieux besoin de se protéger contre eux ne s’imposât pas aux agglomérations commerciales. De même que les marchands ne se risquaient qu’en armes sur les routes, de même aussi ils firent de leurs résidences collectives des manières de places fortes. Les établissements qu’ils fondèrent au pied des cités ou des bourgs rappellent, d’une

  1. Voyez la carte de Bruges au commencement du xiie siècle dans H. Pirenne, Histoire du meurtre de Charles le Bon par Galbert de Bruges (Paris, 1891).
  2. Boretius, Capitularia regum francorum, t. II, p. 405. Cf. Dümmler, Jahrbücher des Fränkischen Reiches, 2e édit., t. III, p. 129, n. 4.