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fession. On peut constater nettement, dès le commencement du xie siècle, une véritable attraction de la population rurale par la population urbaine. Plus augmentait la densité de celle-ci, plus aussi s’intensifiait l’action qu’elle exerçait autour d’elle. Elle avait besoin pour son entretien journalier, non seulement d’une quantité, mais aussi d’une variété croissante de gens de métier. Les quelques artisans qui avaient jusqu’alors suffi aux besoins restreints des cités et des bourgs ne pouvaient évidemment répondre aux exigences multipliées des nouveaux venus. Il fallut donc que les travailleurs des professions les plus indispensables : boulangers, brasseurs, bouchers, forgerons, etc., arrivassent du dehors.

Mais le commerce lui-même suscitait l’industrie. Dans toutes les régions où celle-ci était pratiquée à la campagne, il s’efforça et il réussit à l’attirer tout d’abord, puis bientôt à la concentrer dans les villes.

La Flandre fournit à cet égard un exemple des plus instructifs. On a déjà vu que depuis l’époque celtique, l’exercice de la draperie n’avait pas cessé d’y être très largement répandu. Les draps confectionnés par les paysans avaient été transportés au loin, avant la période des invasions normandes, par la navigation frisonne. Les marchands des villes ne devaient pas manquer à leur tour d’en tirer parti. Dès la fin du xe siècle, nous savons qu’ils transportaient du drap en Angleterre[1]. Ils apprirent bientôt à y connaître l’excellente qualité de la laine indigène et ils se mirent à en introduire en Flandre où ils la firent travailler. Ils se transformèrent ainsi

  1. Voy. plus haut p. 88 n. 2.