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il relève et aux inconvénients que la procédure formaliste de l’ancien droit impose à son activité sociale et économique. C’est l’établissement dans la ville d’une paix, c’est à dire d’une législation pénale qui garantira la sécurité. C’est l’abolition des prestations les plus incompatibles avec la pratique du commerce et de l’industrie et avec la possession et l’acquisition du sol. C’est, enfin, un degré plus ou moins étendu d’autonomie politique et de self-government local.

Tout cela est d’ailleurs très loin de former un ensemble cohérent et de se justifier par des principes théoriques. Rien de plus étranger à l’esprit des bourgeoisies primitives qu’une conception quelconque des droits de l’homme et du citoyen. La liberté personnelle elle-même n’est point revendiquée comme un droit naturel. On ne la recherche que pour les avantages qu’elle confère. Cela est si vrai, qu’à Arras par exemple, les marchands tentent de se faire passer pour des serfs du monastère de Saint Vaast, afin de jouir de l’exemption du tonlieu qui est accordée à ceux-ci[1].

C’est depuis le début du xie siècle que l’on aperçoit les premières tentatives dirigées par la bourgeoisie contre l’ordre de choses dont elle souffre. Ses efforts désormais ne s’arrêteront plus. À travers des péripéties de tout genre, le mouvement de réforme tend irrésistiblement à son but, brise s’il le faut de haute lutte les résistances qu’on lui oppose et aboutit enfin, dans le courant du xiie siècle, à doter les villes des institutions municipales essentielles qui seront à la base de leurs constitutions.

  1. H. Pirenne, L’origine des constitutions urbaines au Moyen Âge (Revue historique, t. LVII, p. 25-34)·