Page:Pirenne - Les Villes du Moyen Âge, 1927.djvu/174

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bien marquée. Placée dans des conditions économiques nouvelles, le sol urbain a fini par acquérir un droit nouveau approprié à sa nature. Sans doute les vieilles cours foncières n’ont pas disparu brusquement. L’affranchissement du sol n’a pas eu pour conséquence la spoliation des anciens propriétaires. À moins qu’on ne les ait rachetées, ils ont conservé les portions du sol dont ils étaient seigneurs. Mais la seigneurie qu’ils exercent encore sur elles n’entraîne plus la dépendance personnelle des tenanciers à leur égard.

Le droit urbain n’a pas supprimé seulement la servitude, personnelle et la servitude foncière, il a fait disparaître aussi les droits seigneuriaux et les redevances fiscales qui entravaient l’exercice du commerce et de l’industrie. Le tonlieu (teloneum) qui grevait si lourdement la circulation des biens était particulièrement odieux aux bourgeois et, de bonne heure, ils ont fait effort pour s’en affranchir. Le journal de Galbert nous montre que c’est là en Flandre, en 1127, une de leurs principales préoccupations. C’est parce que le prétendant Guillaume de Normandie ne tient pas sa promesse de le leur abandonner qu’ils se soulèvent contre lui et appellent Thierry d’Alsace. Au cours du xiie siècle, partout, de gré ou de force, le tonlieu se modifie. Ici, il est racheté moyennant une rente annuelle, ailleurs, ses modes de perception sont transformés. Presque toujours il est placé plus ou moins complètement sous la surveillance et sous la juridiction de la ville. Ce sont ses magistrats qui exercent maintenant la police du commerce et se substituent aux châtelains et aux anciens fonctionnaires domaniaux dans la réglementation des poids