Page:Pirenne - Les Villes du Moyen Âge, 1927.djvu/198

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que les services dus par le premier au second au lieu d’être de nature économique sont de nature militaire et politique. De même que chaque prince territorial requiert l’aide et le conseil de ses vassaux, de même, étant lui-même vassal du roi, il est astreint à son égard à des obligations analogues. Ainsi, seuls interviennent dans la direction des affaires publiques ceux qui détiennent le sol. Ils n’y interviennent d’ailleurs qu’en payant de leur personne, c’est à dire, pour employer l’expression consacrée consilio et auxilio, par leur conseil et par leur aide. De contribution pécunière aux besoins de leur suzerain, il ne peut être question à une époque où le capital foncier ne sert qu’à entretenir ses détenteurs. Le caractère le plus frappant peut-être de l’État féodal, c’est le caractère rudimentaire de ses finances. L’argent n’y joue aucun rôle. Les revenus domaniaux du prince alimentent presque exclusivement sa cassette. Il lui est impossible d’augmenter ses ressources par l’impôt, et son indigence financière lui interdit de prendre à son service des agents révocables et salariés. Au lieu de fonctionnaires, il n’a que des vassaux héréditaires et son autorité sur eux est limitée par le serment de fidélité qu’ils lui ont prêté.

Mais du jour où la renaissance commerciale lui permet d’augmenter ses revenus et que l’argent monnayé commence, grâce à elle, à affluer dans ses coffres, on le voit aussitôt tirer parti des circonstances. L’apparition des baillis au cours du xiie siècle, est le premier symptôme du progrès politique qui va permettre au pouvoir princier de fonder une véritable administration publique et de transformer peu à peu la suzeraineté en souveraineté.