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sur pied, en cas de besoin, des milliers d’hommes bien équipés. Les conservateurs féodaux n’eurent tout d’abord que du mépris pour l’outrecuidance des milices urbaines. Otton de Freisingen s’indigne de voir les communiers de la Lombardie porter le casque et la cuirasse et se permettre de tenir tête aux nobles chevaliers de Frédéric Barberousse. Mais l’éclatante victoire remportée à Legnano (1176) par ces manants sur les troupes de l’empereur, ne tarda pas à montrer ce dont ils étaient capables. En France, les rois ne manquèrent pas de recourir à leurs services. Ils se donnèrent comme les protecteurs des communes, comme les gardiens de leurs libertés et firent apparaître la cause de la couronne comme solidaire des franchises urbaines. Philippe-Auguste devait recueillir les fruits d’une politique si habile. La bataille de Bouvines (1214) qui établit définitivement la prépondérance de la royauté à l’intérieur de la France et fit rayonner son prestige sur toute l’Europe, fut due en grande partie aux contingents militaires des villes.

L’influence des villes à la même époque ne fut pas moins considérable en Angleterre, encore qu’elle s’y soit manifestée d’une façon fort différente. Ici, au lieu de soutenir la royauté, elles s’insurgèrent contre elle à côté des barons, et elles contribuèrent ainsi à préparer le gouvernement parlementaire dont on peut faire remonter à la Grande Charte (1212) les lointaines origines.

Ce n’est pas seulement en Angleterre, au surplus, que les villes revendiquèrent et obtinrent une participation plus ou moins large au gouvernement. Leur tendance naturelle les portait à se transformer