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presque toujours accompagnée de l’autorisation d’y établir un atelier monétaire[1]. Ainsi, l’État ne peut conserver le monopole de la frappe du numéraire. Il va s’éparpillant sans cesse. Et cela encore est une manifestation non équivoque du déclin économique. Car l’histoire constate que plus la circulation commerciale est puissante, plus le système monétaire se centralise et se simplifie. La dispersion, la variété et pour tout dire l’anarchie dont il donne de plus en plus le spectacle à mesure que l’on descend le cours du ixe siècle, achève donc de confirmer de la manière la plus significative, l’impression d’ensemble que nous cherchons à dégager ici.

On a prétendu cependant attribuer à Charlemagne une politique économique à larges vues. C’est là lui prêter des idées que, si grand qu’on suppose son génie, il est impossible qu’il ait eues. Personne ne peut soutenir avec quelque vraisemblance que les travaux qu’il fit commencer en 793 pour joindre la Rednitz à l’Altmühl et faire communiquer ainsi le Rhin avec le Danube, aient dû servir à autre chose qu’au transport des troupes, et que les guerres contre les Avars aient été provoquées par le désir de s’ouvrir une route commerciale vers Constantinople. Les stipulations, d’ailleurs inopérantes, des capitulaires sur les monnaies, les poids et les mesures, les tonlieux et les marchés se rattachent intimement à ce système général de règlementation et de contrôle qui est

  1. G. Waitz, Deutsche Verfassungsgeschichte, 2e édit., t. IV (1885), p. 112 ; F. Lot, Un grand domaine à l’époque franque. Ardin en Poitou, contribution à l’étude de l’impôt dans Cinquantenaire de l’École des Hautes Études. Mélanges publiés par la Section des Sciences historiques et philologiques, p. 109 (Paris, 1921).