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celui de la législation carolingienne. Il en est de même des mesures prises contre l’usure et de la défense faite aux membres du clergé de se mêler de négoce. Leur but est de combattre la fraude, le désordre, l’indiscipline et d’imposer au peuple la morale chrétienne. Seule une idée préconçue peut les envisager comme destinées à stimuler le développement économique de l’Empire.

On est tellement habitué à considérer le règne de Charlemagne comme une époque de renaissance que l’on est inconsciemment porté à y supposer dans tous les domaines un progrès identique. Malheureusement, ce qui est vrai de la culture littéraire, de l’état religieux, des mœurs, des institutions et de la politique ne l’est pas de la circulation et du commerce. Toutes les grandes choses que Charlemagne a accomplies l’ont été, soit par sa puissance militaire, soit par son alliance avec l’Église. Or, ni l’Église, ni les armes ne pouvaient maîtriser les circonstances en vertu desquelles l’Empire franc se trouvait privé de ses débouchés vers l’extérieur. Il a bien fallu s’accommoder d’une situation qui s’imposait inéluctable. L’histoire est forcée de reconnaître que, si brillant qu’il apparaisse par ailleurs, le siècle de Charlemagne, à le considérer du point de vue économique, est un siècle de régression.

L’organisation financière de l’Empire franc achèvera de nous en convaincre. Elle est, en effet, aussi rudimentaire qu’il est possible. L’impôt public, que les Mérovingiens avaient conservé à l’imitation de Rome, n’existe plus. Les ressources du souverain ne consistent que dans le revenu de ses domaines, dans les tributs levés sur les peuples