Page:Pirenne - Les Villes du Moyen Âge, 1927.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fiscale et un trésor pourvoyant aux traitements des fonctionnaires, aux travaux publics, à l’entretien de l’armée et de la flotte. L’impuissance financière qui causa sa chute est la démonstration évidente de l’impossibilité où il s’est trouvé de maintenir sa structure administrative sur une base économique qui n’était pas à même de la supporter.

Cette base économique de l’État comme de la société, c’est désormais la propriété foncière. De même que l’Empire Carolingien est un État terrien sans débouchés, de même aussi, il est un État essentiellement agricole. Les traces de commerce que l’on y relève encore ne sont qu’une quantité négligeable. Il ne connaît plus d’autre fortune que la fortune foncière, d’autre travail que le travail rural. Et, sans doute, cette prédominance de l’agriculture n’est pas un fait nouveau. On la rencontre déjà très marquée à l’époque romaine et elle s’est continuée en se renforçant encore à l’époque mérovingienne. Dès la fin de l’Antiquité, tout l’Occident de l’Europe était couvert de grands domaines appartenant à une aristocratie dont les membres portaient le nom de Sénateurs (Senatores). De plus en plus la petite propriété allait disparaissant pour se transformer en tenures héréditaires, pendant que les anciens fermiers libres se transformaient eux-mêmes en colons attachés à la glèbe. L’invasion germanique n’altéra point très sensiblement cet état de choses. On a renoncé définitivement à se représenter les Germains sous l’apparence d’une démocratie égalitaire de paysans. Les contrastes sociaux étaient très grands parmi eux lorsqu’ils pénétrèrent dans l’Empire. Ils comprenaient une minorité de riches et une majorité de pauvres. Le