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estuaires pour que leurs marins ne l’aient point fréquenté de très bonne heure. C’est à eux, on l’a vu plus haut, que les ports de Duurstede et de Quentovic durent leur importance. Mais cette importance fut éphémère. Elle ne put survivre à l’époque des invasions normandes. Plus facile était l’accès de la contrée, plus elle attirait les envahisseurs et plus elle eut à souffrir de leurs dévastations. La situation géographique qui à Venise avait sauvegardé la prospérité Commerciale devait naturellement ici contribuer à son anéantissement.

Les invasions normandes n’avaient été que la première manifestation du besoin d’expansion ressenti par les peuples scandinaves. Leur énergie débordante les avait jetés à la fois vers l’Europe Occidentale et vers la Russie en aventuriers pillards et conquérants. Ce n’étaient point de simples pirates. Ils aspiraient, comme l’avaient fait jadis les Germains à l’égard de l’Empire Romain, à s’installer dans des régions plus riches et plus fertiles que n’était leur patrie et à s’y créer des établissements pour la population surabondante que celle-ci ne pouvait plus nourrir. Ils réussirent finalement dans cette entreprise. À l’Est, les Suédois prirent pied le long des voies naturelles qui, par la Neva, le lac Ladoga, la Lowat, le Wolchow, la Dwina et le Dnieper conduisent de la Mer Baltique à la Mer Noire. À l’Ouest, les Danois et les Norvégiens colonisèrent les royaumes anglo-saxons au Nord du Humber et se firent céder en France par Charles le Simple, sur les côtés de la Manche, le pays qui, depuis lors, a pris le nom de Normandie.