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l’historiographie du ixe siècle, n’aient été fabriqués en Flandre[1]. Ils apparaissent comme les seuls produits manufacturés faisant, à l’époque carolingienne, l’objet d’un certain commerce. Les Frisons les transportaient le long de l’Escaut, de la Meuse et du Rhin, et lorsque Charlemagne voulut répondre par des présents aux politesses du khalife Haroun-al-Raschid, il ne trouva rien de mieux à lui offrir que des pallia fresonica. On doit admettre que ces étoffes, aussi remarquables par leurs belles couleurs que par leur moelleux, durent attirer tout de suite l’attention des navigateurs scandinaves du xe siècle. Nulle part, dans le Nord de l’Europe, on ne rencontrait de produits plus précieux et elles prirent certainement place, à côté des fourrures du Nord et des tissus de soie arabes et byzantins, parmi les objets d’exportation les plus recherchés. Selon toute apparence, les draps qui sont signalés au marché de Londres vers l’an mil, étaient des draps de Flandre. Et les débouchés nouveaux que leur offrait maintenant la navigation ne purent manquer de donner à leur fabrication un nouvel essor.

Ainsi, le commerce et l’industrie, celle-ci pratiquée sur place, celui-là venant du dehors, s’unirent pour donner à la région flamande, dès le xe siècle, une activité économique qui ne devait plus cesser de se développer. Au xie siècle, les progrès réalisés sont déjà surprenants. La Flandre trafique dès lors avec le Nord de la France dont elle échange les vins contre ses draps. La conquête de l’Angleterre par Guillaume de Normandie, rattachant au con-

  1. H. Pirenne. Draps de Frise ou draps de Flandre ? (Vierteljahrschrift für Social und Wirtschaftsgeschichte, t. VII [1909], p. 308).