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Page:Piron - Poésies badines et facétieuses, 1800.djvu/115

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Alors avec David il prononce ces mots :
« La vérole, mon Dieu, ma criblé jusqu’au os ! »
Car, par Malum, David entend l’humeur impure
Qu’il prit d’Abigaïl, comme je conjecture :
D’autant que cette femme, épouse de Nabal,
De son mari, pouvait avoir gagné ce mal.
Ce Nabal, en effet, est peint au saint volume,
Tel qu’un compagnon propre au poil comme à la plume ;
Et qui, quand il trouvait fille de bonne humeur,
De ses bubons enflés méprisant la tumeur,
Lui faisait sur le dos faire la caracole,
Eût-il été certain de gagner la vérole.
Aussi, je suis surpris, que David, ce grand clerc,
Au fait d’Abigaïl, ait pu voir si peu clair ;
Certes, besoin n’était d’être si grand prophète,
Ni d’avoir sur son nez la divine lunette,
Pour voir que de Nabal, tout le sang corrompu,
Ayant poivré le flanc qui s’en était repu,
C’était nécessité que son hardi Priape
Eût la dent agacée en mordant à la grappe.
Mais quoi, vit-on jamais raisonner un paillard ?
Il prit, les yeux fermés, ce petit mal gaillard,
Dont quelque temps après, sa flamberge en furie,
Enticha le vagin de la femme d’Urie…

De mes ébats aussi, j’ai tiré l’usufruit ;
Mais grâce au vif argent, mon virus est détruit ;
Mon sang purifié coule libre en mes veines,
Et deux globes malins ne gonflent plus mes aines ;
Du trône du plaisir, les pores resserrés,
Ne laissent plus couler, mille sucs égarés,